Le droit du travail n’est toujours pas « plus chaud que le climat » !

Avant même l’été, la chaleur a déjà probablement provoqué un accident du travail mortel, un ouvrier du BTP ayant succombé à un malaise sur un chantier bordelais le 20 juin. Il est plus que jamais nécessaire de mieux protéger les travailleur·euses contre les épisodes de canicule et fortes chaleurs de plus en plus récurrents et intenses dans le contexte de dérèglement climatique ! Pour la CNT-SO, au-delà des effets d’annonce, la prochaine évolution du droit du travail sur cette question, est loin d’être satisfaisante !

En plus des dispositions déjà existantes, un nouveau chapitre spécifique du code du travail entre en vigueur, à compter du 1er juillet 2025. Ce nouveau texte regroupe un ensemble de dispositions concernant la «prévention des risques liés aux épisodes de chaleurs intenses» mais il comporte de nombreux angles morts et insuffisances qui en réduisent la portée !

Ainsi les nouveaux textes sont concentrés sur l’évaluation des risques. Ils laissent en suspend la question de la définition de seuils thermiques opposables en fonction du type d’activités. Cela laisse une trop grande part d’appréciation à l’employeur et fragilise les éventuels droits de retrait en cas de fortes chaleurs.

Pourtant des seuils reconnus existent mais relèvent de la simple recommandation : il est nécessaire de leur donner un cadre légal ! L’Institut National de Recherche et de Sécurité considère ainsi que les valeurs de 30 °C pour une activité sédentaire et 28 °C pour un travail nécessitant une activité physique peuvent être utilisées comme repères pour agir en prévention. De même, la CNAM recommande de faire évacuer le personnel des bureaux quand les conditions d’hygiène et de sécurité deviennent mauvaises, avec un seuil de température résultante fixé à 34° l’été et 14° l’hiver (recommandation CNAM R.226).

La législation lie l’évaluation des risques et les mesures de prévention contre les fortes chaleurs aux alertes météorologiques Météo France ce qui rend ces nouvelles dispositions inopérantes dans bien des cas. La question de l’ambiance thermique, comme toute évaluation des risques doit être liée aux contraintes spécifiques aux unités de travail et postes de travail et non à des conditions extérieures indépendantes des conditions réelles de travail.

Nous sommes également critiques des capacités de mise en application et de contrôle de ces mesures d’autant plus dans un contexte de réduction des effectifs de l’inspection du travail (des centaines de sections restent non pourvues et seuls 45 postes sont ouverts au concours en 2025). Ces nouvelles dispositions ne débouchent pas sur des mesures contraignantes avec pénalités directement associées et n’offrent pas de nouveaux pouvoirs aux agent·es de l’inspection du travail comme un arrêt d’activité. En l’état actuel des choses ces nouvelles dispositions ressemblent à de simples recommandations. Dans ce cadre la nouvelle procédure de mise en demeure préalable à PV paraît totalement inadaptée dès lors que les nouvelles dispositions sont liées à des épisodes très spécifiques et temporaires que sont les alertes météo.

Pour la CNT-SO, la montagne annoncée accouche d’une souris. Avec de telles dispositions nous continuerons inévitablement à avoir des morts au travail pour cause de chaleur !

Nous continuons de revendiquer :
  • la reconnaissance de seuils de température opposables par les travailleur·euses en fonction du type d’activité et déclenchant des mesures de protection décorrélées des vigilances Méteo France ;

  • un renforcement des capacités de contrôle et sanction ainsi que des effectifs de l’inspection du travail.

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Retrouvez notre tuto d’auto-défense syndicale spécial « fortes chaleurs » (cliquez sur l’image)