Le 9 juillet, le CNESER (Conseil National de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche) examinera le projet d’arrêté Licence, dont la dernière version date du 02 juillet.
De façon complémentaire à la logique déroulée par la mise en place de la sélection en Master en 2017, puis par la généralisation de la sélection en première année de Licence entraînée par le « Plan Etudiants » (ou Loi ORE), cette nouvelle mouture de l’arrêté Licence favorise délibérément la sélection sociale, en créant de l’échec supplémentaire. Le nouveau frein à la réussite est la fin de la compensation « totale » en Licence. Si ce texte est adopté, il sera laissé aux établissements la liberté de bloquer volontairement la compensation entre les UE (Unités d’Enseignement).
L’annonce que la compensation ne serait possible qu’au sein d’un même bloc de « compétences/connaissances » pourrait apparaître justifiée pédagogiquement, mais le diable se cache souvent dans les détails, et le seul cadrage de cette modalité le confirme. Les périmètres des UE et des blocs de compétences devront juste être « clairement identifiés dans les modalités de contrôle des connaissances et des compétences communiquées aux étudiants ». C’est-à-dire que les directions d’universités auront en réalité une liberté totale pour les définir.
Souvenons-nous, lors de l’autorisation de la sélection à l’entrée du Master, il s’agissait de laisser aux universités la même « liberté » de recruter leurs étudiants dans les filières dites « sous tension ». Plus d’un an après, on ne peut que constater qu’une sélection brutale et drastique s’est généralisée dans quasiment tous les Masters d’une écrasante majorité d’universités.
Mais ce projet d’arrêté Licence ne s’arrête pas là dans la fabrique de l’échec, le contrôle continu est renforcé et il est précisé qu’il pourra se faire « en présentiel ou en ligne ». Les étudiants précaires ne disposant pas d’un accès internet apprécieront. Ce texte ouvre aussi davantage la voie à des cours dématérialisés, maquillés ici sous le vocable de « pédagogies diversifiées visant à renforcer les capacités d’apprentissage autonome».
Concernant les secondes sessions d’évaluations, parfois appelées « rattrapages », une large interprétation est laissée aux établissements et le délai actuel de 15 jours pour réviser entre les deux sessions n’est désormais plus mentionné dans ce nouveau texte.
Une autre nouveauté introduite par ce texte, et non des moindres, concerné le contrat pédagogique, renommé (ironiquement ?) « contrat pédagogique pour la réussite étudiante ». Désormais, il n’est plus assuré que l’étudiant aura le dernier mot sur les modalités du contrat. Il est à craindre de voir se développer à travers ce changement un outil de professionnalisation en marche forcée durant la Licence, ce qui empêchera ainsi directement une partie des étudiants d’accéder au master. Pire encore, il est désormais écrit noir sur blanc que « les établissements mettent en place des […] dispositifs d’intégration permettant aux étudiants […] de changer de formation, que ces formations soient internes ou externes à l’établissement. » Il s’agit clairement ici de réorientation forcée, et possiblement en dehors de l’université. En résumé, il sera possible de jeter littéralement des étudiants en difficulté à la rue !
Alors que l’annonce du « Plan étudiants », devenu Loi ORE, annonçait la généralisation d’une sélection sociale et élitiste dès l’entrée en Licence, le projet d’arrêté Licence qui sera soumis au CNESER le 9 juillet va désormais plus loin et réduit drastiquement les chances de réussites des étudiants, tout en fermant progressivement les chances d’atteindre un niveau Master à un nombre de plus en plus élevé.
Nous rappelons que la poursuite d’études et l’accès à un diplôme de l’enseignement supérieur reste une des rares chances, aujourd’hui, d’échapper à une précarité accrue dans le monde du travail. Le gouvernement fait encore une fois le choix, après avoir mis sur le carreau des milliers de jeunes via la plateforme « Parcoursup », de maintenir une génération entière dans la précarité.
Face à ces projets délétères, le Syndicat de Combat Universitaire de Montpellier (SCUM) continuera à se mobiliser et multipliera les actions. Notre avenir nous appartient, et nous sommes prêts à nous battre pour le défendre !
-> Lire sur notre site web, avec le texte de l’arrêté licence et le communiqué des organisations nationales présentes au CNESER (le SCUM fait partie de la coalition étudiante « Parole Etudiante »), qui possède un élu au CNESER) : https://combatuniversitaire.wordpress.com/2018/07/06/la-compensation-des-notes-et-les-secondes-evaluations-attaquees-un-arrete-licence-qui-fabrique-davantage-dechec/